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Tropical Beach : laisse béton !

  • Photo du rédacteur: saintbarth-boisgratte
    saintbarth-boisgratte
  • 19 mai 2022
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 10 févr. 2024

Un restaurant de plage à Lorient, en voilà une bonne idée ! Pourquoi n'y avait-on pas pensé plus tôt ? Heureusement, Julien Sormonte va remédier à la désertification d'un village moribond qui attendait désespérément de voir sa plage animée par un second Nikki Beach…





Première tentative


C'est donc en septembre 2021 qu'est présenté le projet au Conseil exécutif.

Il s'agit d'un restaurant, bar, hôtel de deux suites, boutique, situés sur la plage (à peu près face au salon de coiffure).

Comme d'habitude, démarche hyper éco-responsable, respect absolu pour l'île et son histoire, insertion paysagère à couper le souffle : le terrain sera encore plus naturel et la végétation encore plus belle qu'avant, promis juré !


Étonnement, le Conseil exécutif, sans doute mal luné, refuse le permis pour des motifs multiples et parfaitement légitimes. Voici donc la liste des griefs opposés au pétitionnaire :


- Le projet, de part son importance, notamment sa sortie sur la voie publique qui se fait juste avant le virage sur une voie à haute circulation, présente un risque pour la sécurité des personnes (art. 112-2 du Code de l'urbanisme).

- Le trafic important généré par un restaurant est incompatible avec l'aménagement de l'accès prévu à cet effet. Cet accès est dangereux du fait de son absence de visibilité (art. 112-2 du Code de l'urbanisme).

- La circulation des véhicules est compliquée au niveau de l'îlot central. Les déplacements de véhicules à cet endroit ne peuvent se faire sans avoir à manœuvrer d'autres véhicules (art. 112-14 du Code de l'urbanisme).

- L'escalier s'implante en dehors des limites de propriété et, de surcroît, sur le domaine maritime. La piscine à construire est à moins de trois mètres des plus hautes eaux (art. 112-19 du Code de l'urbanisme).

- Le faîtage du bâtiment cuisine est en biais. Cette différence rend le projet incompatible avec le bâti environnant (art. U-8 du Règlement de la Carte d'urbanisme).

- Les espaces non imperméabilisés et végétalisés sont insuffisants (art. U-10-11 du Règlement de la Carte d'urbanisme).


C'est le genre de délibération qui incite à revoir sérieusement son projet, et à engueuler l'architecte par la même occasion !

Pourtant, la SC Management SAS, dirigée par Julien Sormonte, va déposer un recours gracieux sans aucune rectification ni correction concernant les points évoqués lors du refus. Le projet est à 100 % le même et la Collectivité est priée de revoir sa copie…



Bingo !


Le recours est donc formulé, et on imagine que les étapes réglementaires (courrier, débat oral ou écrit contradictoire, etc.) sont respectées. Arrive donc le jour du Conseil exécutif qui doit délibérer. Roulement de tambours… permis accordé à la majorité moins une voix (Marie-Angèle Aubin) !

C'est donc officiellement le 3 décembre 2021 que le Conseil exécutif a estimé que tous les manquements aux règlements soulevés en septembre n'étaient que des foutaises malvenues et que le projet respectait désormais toutes les règles. Mesdames et Messieurs les conseillers Bruno Magras, Nicole Gréaux, Andy Laplace, Nils Dufau et Alfred Brin ont dû estimer qu'ils avaient mal lu le dossier en septembre, ou qu'ils avaient eu une digestion difficile. Finalement, les allées et venues de véhicules ne présentent aucun danger, les parkings sont conformes, la piscine dans la bande des trois mètres inconstructible ne dérangera personne, le toit en biais est bien plus joli que les toits voisins et il y a plein d'espaces végétalisés.

Il y a juste une prescription concernant le petit escalier d'accès à la plage, qui doit être supprimé.


Chacun jugera ce retournement d'opinion soudain et inexpliqué.



Voisinage malveillant


Tout aurait pu bien se passer et les bétonneuses tourner à plein régime sans l'intervention de quelques voisins qui ont déposé un recours gracieux demandant l'annulation de ce permis.

Le recours reprenait tous les manquements soulevés par le CE lors du refus de septembre, ainsi que d'autres pudiquement passés sous silence lors de l'instruction du dossier, dont le manque flagrant de places de stationnement. Sans entrer dans les détails, il aurait fallu au minimum 44 places quand le projet n'en présente que 26, pour la plupart peu conformes. Cet aspect est d'importance car de nombreuses personnes se sont vu refuser leur permis pour une seule place manquante ! Instruction à deux vitesses ?



Le coup de pied de l'âne


À cette étape, il faut entrer dans les finesses administratives pour comprendre la suite.

Le recours a été réceptionné le 19 janvier 2022. La collectivité avait deux mois pour y répondre si elle le souhaitait, donc jusqu'au 19 mars 2022.


Parallèlement, une administration telle que la Collectivité dispose de trois mois à compter du jour de notification d'une décision pour revenir sur celle-ci et l'annuler si elle estime devoir le faire. La décision datant du 3 décembre 2021, elle pouvait donc le faire jusqu'au 3 mars. Au-delà de ce délai, le seul motif d'annulation possible est celui de fraude. C'est-à-dire qu'il faut invoquer une fraude, acte délibéré de la part du pétitionnaire (fausses déclarations, dissimulation d'éléments…) pour obtenir son permis de construire. C'est la seule raison invocable, mais encore faut-il qu'elle soit probante.


Pour résumer, le CE pouvait répondre au recours gracieux formulé par les voisins entre le 19 janvier et le 3 mars, temps largement suffisant pour ce faire. Il aurait pu de ce fait annuler le PC pour plusieurs des motifs invoqués, voire pour la totalité.

Dans ce cas, la contestation devant un tribunal aurait été très difficile et aléatoire pour la SC Management SAS, qui aurait sans doute hésité à porter l'affaire devant les juges, tant les irrégularités de son permis étaient flagrantes.


Ce n'est pourtant pas l'option qu'a choisie Bruno Magras.

Dans un premier temps, le CE a voté un retrait du permis en question.

Seulement, il n'a pas mis en œuvre la procédure contradictoire, qui consiste à informer le pétitionnaire d'un recours à son encontre. Ce dernier doit répondre et argumenter son point de vue, apporter éventuellement des éléments correctifs, par oral ou écrit, assisté ou non d'un conseil. Le CE peut ensuite se prononcer et rendre sa décision. Tout cela prend en moyenne une quinzaine de jours, voire trois semaines, ce qui était largement suffisant pour rester dans les clous.

OUPS ! Le retrait n'était donc pas légal. À ce niveau de responsabilité, et après 25 ans de pouvoir, qui peut imaginer qu'un Président de Collectivité, assisté d'un service de l'urbanisme et d'un service juridique, puisse oublier de façon aussi désinvolte une procédure obligatoire et courante ? Un acte manqué ?

Toujours est-il que le temps est passé, et qu'il a fallut soi-disant entamer cette fameuse procédure contradictoire, laissant ainsi passer la date fatidique du 3 mars.


Il ne restait à ce moment que la solution du retrait pour fraude. Or, ce motif d'annulation est particulièrement fragile. C'est en effet à l'administration de démontrer la fraude et d'en apporter les preuves. Même si certains éléments erronés sont fournis par le pétitionnaire, il faut encore que ces erreurs soient considérées comme intentionnelles et comme un obstacle n'ayant pas permis à l'administration de prendre sa décision en toute connaissance de cause.


Une belle porte ouverte à la SC Management SAS…


Moralité, dans le cas où la SC Management SAS porterait l'affaire au Tribunal, si celui-ci lui donne raison, le permis sera intégralement réhabilité tel qu'au premier jour.

Le seul recours possible sera une procédure contentieuse devant le Tribunal administratif engagée par les mêmes voisins qui avaient formulé le recours gracieux (ce qu'ils ne manqueront pas de faire, n'en doutez pas). En effet, la Collectivité ne pourrait au mieux que faire appel de la décision sur un dossier très fragile.


Finalement, on refuse un permis pour des motifs très valables, puis on l'accepte sans qu'aucun des motifs ne soit corrigé, puis, sous la pression, on fait semblant de l'annuler en sachant parfaitement que la décision sera caduque, et enfin on l'annule en sachant que le motif est bidon. Jongler entre les intérêts privés d'un investisseur et les accusations de bétonnage en pleine période d'élections, c'est un métier !


On dit merci à qui pour cette opportunité d'aller nous baigner au rythme de la techno assourdissante et des meuglements de quelques fêtards bourrés comme à Saint-Jean ?









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